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 PORTRAIT 4 

Manju Devi &
Taramuni Devi 

 Quand lire et écrire redonnent de la dignité

Au Bihar comme au Jharkhand, le taux d’alphabétisation des femmes est inférieur à la moyenne nationale en Inde de 71,5%. A ce faible pourcentage, s’ajoutent des problématiques d’abandon scolaire chez les adolescentes dans ces deux États. Ces chiffres mettent en lumière les profondes inégalités de genre et soulignent la nécessité de mettre en place des initiatives d’éducation non-formelle spécifiquement pensées pour les femmes.

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Conscients de ce besoin, les équipes de Karuna-Shechen ont introduit dès 2011, un programme d’Education Non-Formelle (ENF) dans six villages du Bihar. Au fil des années, ce programme a joué un rôle profondément transformateur dans la vie de nombreuses femmes analphabètes ou semi-alphabètes de ces zones rurales. Au-delà de l’apprentissage de la lecture, l’écriture et du calcul, il cherche à créer pour les femmes des espaces sûrs, où celles-ci peuvent développer leur confiance en elles, leur capacité de réflexion critique, et construire ensemble un chemin vers plus d'autonomie.

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Abhishek, le coordinateur Éducation au Bihar, et deux participantes du programme ENF, Manju Devi et Taramuni Devi, originaires du village d’Usewa ont partagé leur vécu à ce propos, nous offrant un éclairage sensible sur leur quotidien depuis cet apprentissage.

Namaste ! Je m’appelle Abhishek. Avant de parler du programme, j’aimerais vous connaître un peu mieux. Pouvez-vous me parler de vous et de votre famille ?

Manju : Je m’appelle Manju Devi, je vis dans le village d’Usewa. Mon mari s’appelle Bhim Ravi Das, j’ai 40 ans et quatre enfants. Nous travaillons dur, entre les tâches domestiques et les petits boulots, pour subvenir aux besoins de la famille, notamment pour garantir à nos enfants nourriture et éducation. Mon fils aîné poursuit actuellement une licence, mon deuxième est en seconde, et les deux autres sont encore à l’école primaire.

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Taramuni : Je suis Taramuni Devi, j’ai 52 ans. Mon mari s’appelle Ramesh Das. Nous sommes dix dans la famille : six filles, deux garçons, mon mari et moi. Nous vivons grâce à des petits travaux journaliers.

Jusqu’à quelle classe avez-vous été scolarisée ? Pouvez-vous me dire ce qui vous a amenée à arrêter l’école à ce moment-là ?

Taramuni : J’ai été élevée par mes grands-parents maternels, qui ont soutenu ma scolarité. J’ai étudié jusqu’en CE2. Mais après le décès de ma mère, il n’y avait plus personne pour me guider, et j’ai dû abandonner l’école, faute de soutien.

 

Manju : Pour ma part, l’école primaire que je fréquentais était dans un village voisin, un peu éloigné. Mon frère m’y accompagnait, mais quand il a terminé l’école en CM2 alors que j’étais en CE1, je n’avais plus personne pour m’emmener, alors j’ai dû arrêter.

Avant de rejoindre le programme d’éducation non-formelle (ENF) proposé par Karuna-Shechen, comment avez-vous su que cette initiative existait ? Qu’est-ce qui vous a donné envie d’y participer ?

Taramuni : J’ai assisté à une réunion organisée par les animatrices de santé communautaire, où j’ai entendu parler de Karuna-Shechen et de ses activités. J’y ai rencontré Rachna, une professeure, qui nous a présenté le programme d’alphabétisation pour adultes et ses bienfaits. Quand elle nous a demandé si nous voulions apprendre, nous avons tout de suite accepté. ​

Nous avons compris que l’éducation pouvait nous aider à grandir et à évoluer.

Manju : Moi aussi, c’est lors d’une réunion communautaire que j’ai entendu parler du programme. Rachna a expliqué comment les cours se déroulaient et nous a encouragées à y consacrer deux heures par jour. Beaucoup de femmes du village se sont jointes au programme, et nous avons commencé à apprendre ensemble.

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L’entrée dans un programme comme celui-ci est souvent un moment fort. Qu’avez-vous ressenti lors de vos premiers cours ? Vos proches vous ont-ils soutenus dans cette démarche  ?

Taramuni : C’était une très belle expérience, très enrichissante. On nous a expliqué le fonctionnement des cours, leur importance, et les compétences que nous allions acquérir. Rachna Didi nous a montré des exemples concrets : lire des pancartes, gérer de l’argent, comprendre des instructions médicales. Elle a tout expliqué avec patience. Par ailleurs, ma famille m’a soutenue, et j’ai réussi à m’organiser pour finir les tâches ménagères avant les cours. Mon mari et mes enfants ont compris l’importance de cette opportunité et m’ont aidée à mieux gérer mon emploi du temps. L’ambiance était encourageante, ce qui rendait l’apprentissage plus facile.

 

Manju :  Pareil pour moi. Ma famille m’a encouragée à apprendre, à évoluer et à gagner en autonomie. Leur soutien a été déterminant. J’ai adoré apprendre en groupe. On partageait nos histoires, on s’entraidait pour lire et écrire, et une belle solidarité est née entre nous. Cela a rendu l’expérience joyeuse et riche de sens.

L’apprentissage de la lecture et de l’écriture demande souvent beaucoup de courage et de persévérance. Quelles ont été, pour vous, les principales difficultés rencontrées en chemin ? Qu’est-ce qui vous a aidé à continuer ?

Taramuni : L’alphabet anglais et les tables de multiplication étaient difficiles. Mais l’environnement était bienveillant. Le professeur nous consacrait du temps individuellement, et le soutien de ma famille m’a portée.

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Manju : Jongler entre les tâches ménagères et les cours n’était pas simple, mais j’ai persévéré. Je savais que cet effort aurait un impact positif sur ma famille.

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Quelle valeur de Karuna-Shechen vous touche le plus, et comment s’est-elle traduite concrètement dans votre parcours ?

Taramuni : Le dévouement et l’altruisme de personnes comme Rachna m’inspirent. Grâce à cela, notre communauté est devenue plus forte, plus unie, plus résiliente. Karuna-Shechen en est devenue un pilier : Elle ne nous a pas seulement apporté le savoir, elle nous a aussi soutenues économiquement. La formation en fabrication de bracelets, proposée l’an dernier, a été un tournant pour beaucoup de femmes. Nous recevons aussi des serviettes hygiéniques, des graines et d’autres ressources.

 

Manju : Le partage et la bienveillance. Apprendre ensemble nous a rapprochées, et nous nous soutenons comme une famille élargie. Grâce à Karuna-Shechen, j’ai évolué personnellement et financièrement. Je savais coudre, mais grâce au programme, j’ai pu exprimer mon besoin à Rachna, et elle m’a aidée à obtenir une machine à coudre. Aujourd’hui, je gagne ma vie et je soutiens ma famille.

Découvrez le programme de développement économique  

Qu’est-ce qui, selon vous, a changé dans votre vie depuis que vous suivez les cours d’ENF ?

Taramuni : Avant, je signais avec mon empreinte pour toucher les rations. Je ne pouvais pas lire les instructions, ni les panneaux. Cela me rendait dépendante. Apprendre à lire et à écrire m’a rendue plus autonome. Je suis fière de pouvoir lire les panneaux, suivre des prescriptions médicales, gérer l’argent seule. Je n’ai plus peur de sortir seule.

Manju : Avant, j’avais du mal à gérer l’argent au marché, à effectuer des opérations bancaires simples, ou à comprendre des informations de base. Cela compliquait le quotidien.

L’éducation m’a donné de la force et de la confiance. Je suis désormais indépendante financièrement, et je peux offrir un avenir meilleur à mes enfants.

Parmi tous les changements que vous avez vécus, y en a-t-il un qui vous a particulièrement marquée ? Un moment où vous vous êtes sentie fière de savoir lire et écrire ?

Taramuni : Dernièrement, j’ai lu à voix haute les instructions données par un médecin. Les femmes autour de moi m’ont félicitée. J’ai ressenti une vraie joie intérieure.

 

Manju : Je ressens de la fierté chaque fois que je gère de l’argent, que je fais les courses, ou que j’aide mes enfants à étudier. Mon activité de couture, rendue possible grâce à Karuna-Shechen, m’apporte une grande satisfaction.

Quels sont vos rêves pour l’avenir ?

Manju : Je veux que mes enfants aillent le plus loin possible dans leurs études. Je comprends aujourd’hui la valeur de l’éducation, et je promets de soutenir mon fils aîné jusqu’au bout de son parcours.

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Quel message adresseriez-vous à une femme de votre village qui hésite encore à apprendre ?

Je lui dirais que rester analphabète, c’est se priver de sa liberté. L’éducation est un chemin vers la dignité, l’indépendance et la croissance.

Taramuni

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