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Paule D.
Du yoga à la collecte solidaire, un engagement pour Karuna
C’est une sorte de "troisième vie", un moment où l’on peut penser aux autres, transmettre, donner des cours solidaires pour Karuna. Vous m’offrez une vieillesse utile.
Professeure de yoga depuis 1993, Paule a d'abord exercé cette discipline en parallèle de son travail. En 2015, après les tremblements de terre qui ont frappé le Népal, elle réalise son premier don à Karuna-Shechen. En 2018, le mouvement de solidarité Yoga for Karuna permettant de lancer une initiative personnelle pour récolter des fonds voit le jour, et Paule, fidèle à son engagement, embarque cette fois-ci ses élèves de yoga dans cette aventure collective. Cette première collecte s’est répétée et est par la suite devenue annuelle.
Aujourd’hui, après sept années de dévouement aux côtés de Karuna-Shechen, nous avons souhaité revenir avec elle sur cette expérience, afin de mieux comprendre le lien profond entre le yoga, l’entraide et l’action de notre association.
Sébastien, directeur de la communication et du fundraising, et Adeline, chargée de collecte de fonds, ont échangé avec elle en toute sincérité sur son parcours inspirant.
Bonjour Paule ! Pourrais-tu te présenter et nous partager un peu de ton histoire ?
Paule : Je m'appelle Paule, j'ai 72 ans. Je suis prof de yoga, donc je suis à la retraite professionnelle. Je suis maman de trois enfants merveilleux et grand-mère d'une petite-fille. J'ai fait beaucoup de stages de yoga, j'ai eu -comme dirait Matthieu- la bonne fortune de rencontrer des grands maîtres de yoga inspirants et authentiques. J’ai beaucoup appris auprès d’eux, j’ai fait des stages et obtenu mon diplôme de yoga. Avant de me consacrer pleinement au yoga, j’étais surveillante dans un lycée catholique au Havre. Après ma retraite en 2015, j’ai continué à transmettre le yoga en donnant des cours en soirée, jusqu’à en faire aujourd’hui mon activité principale.
Qu’est ce que t’apporte la pratique du Yoga, tant sur le plan physique que dans ton cheminement intérieur, et en quoi fait-elle écho à ton engagement chez Karuna ?
Paule : Pour moi, le yoga me permet surtout de rester en forme à un âge avancé. Déjà, ça, c'est appréciable ! J’apprends toujours, parce que le corps et le mental, c'est illimité. Il y a toujours quelque chose à découvrir et à pratiquer, et c’est en progressant pas à pas que l’on avance.
Mais le yoga ne s’arrête pas au corps : il parle le même langage que celui de Karuna, la compassion et l’altruisme.
Nous avançons vers les mêmes valeurs. C'est un équilibre pour soi, pour mieux servir les autres. Dans ma vie, j’ai travaillé, puis je suis arrivée à la retraite. Mes enfants sont désormais grands, ce qui me laisse du temps. C’est une sorte de "troisième vie", un moment où l’on peut penser aux autres, transmettre, donner des cours solidaires pour Karuna. Vous m’offrez une vieillesse utile. C’est toujours très satisfaisant de se dire qu’on sert à quelque chose.
Cette envie d’agir a-t-elle toujours fait partie de toi ? Avais-tu déjà d’autres causes qui te tenaient à cœur, ou bien est-ce la rencontre entre le yoga et Karuna qui a éveillé en toi cette volonté de t’impliquer au niveau associatif ?
Paule : Le déclencheur, c’était vraiment le séisme au Népal en 2015. À ce moment-là, je venais de prendre ma retraite et j’avais un petit pécule de côté. J’avais dit à mes enfants : "Je veux en faire quelque chose de spécial." On parlait de voyages, et puis un soir, ils m’ont appelée en me disant : "On part tous les trois avec toi au Népal." C’était décidé… et huit jours après, il y a eu le séisme.
Forcément, ça nous a touchés. À cette époque, je faisais des stages dans un institut bouddhiste en Normandie. J’avais l’habitude de laisser de l’argent pour le projet de construction d’un magnifique temple. Juste après le séisme, j’ai préféré envoyer l’argent au Népal. C’est comme ça que j’ai commencé à donner à Karuna. Pour moi, l’association de Matthieu Ricard était une valeur sûre. Puis, au moment d’encaisser les chèques de mes élèves, on en a discuté et une dizaine d’entre eux ont décidé de faire leur paiement directement à l’ordre de Karuna. On pouvait se le permettre, mes cours fonctionnaient bien. Petit à petit, c’est devenu une habitude.
Lancée en 2018 sous le nom de Yoga for Karuna, Action for Karuna est un mouvement de collectes solidaires au profit des programmes de Karuna-Shechen. Depuis sa création, elle a permis de collecter plus de 210 000€ grâce à 471 collectes et 4 854 donateurs, finançant ainsi des projets essentiels en faveur des populations du Népal, de l’Inde et du Tibet.
À travers une diversité d’activités – événements de yoga, retraites de méditation, cours de cuisine, ateliers, défis sportifs – mais aussi grâce à des collectes organisées pour un anniversaire, un mariage ou en hommage à un proche, chacun peut agir à son échelle et à sa manière.
Vous souhaitez, vous aussi, agir et créer votre collecte solidaire ?
Tu as été l’une des premières à rejoindre le mouvement d’initiatives solidaires lancé par Karuna-Shechen en 2018. Qu’est-ce qui t’a motivée ?
Paule : C'était, l'occasion de faire quelque chose de peut-être un peu plus structuré. Et puis c'est vrai que la façon dont vous aviez fait les choses était ludique : il y avait des collectes, et on pouvait voir celles des uns et des autres sur le site. C'était stimulant et rigolo car c'était un partage avec plein de gens. Cela permettait aussi de choisir d'autres cagnottes, de participer à des projets autres que le mien. À la fin, il y en avait une centaine, me semble-t-il..
Comment as-tu organisé ta cagnotte et en quoi consiste ta collecte de fonds pour Karuna ?
Paule : Au Havre, nous avons la chance d’avoir de beaux jardins publics. Comme c’était le printemps, j’ai décidé d’organiser des cours de yoga en plein air, d’abord tous les samedis, puis le week-end entier. Pratiquer dehors, avec l’air frais et les sons de la nature, apporte une toute autre dimension à la séance, notamment pour la respiration. Les participants ont adoré et, chaque année, ils me demandent : « Quand est-ce que tu recommences les cours en extérieur ? » L’avantage, c’est qu’il n’y a aucun frais de salle, donc l’intégralité des dons est reversée à Karuna. C’est une formule simple et accessible, et on essaie de renouveler l’expérience chaque été.
C’est en fait une aventure collective, puisque tes élèves participent. Qu’en pensent-ils ? Comment les inspires-tu ? Comment les fédère-tu ?
Paule : C'est à eux qu'il faudrait demander ça ! Tous mes cours de yoga finissent toujours par une parole de Matthieu Ricard ou du Dalaï -Lama. C'est orienté vers la compassion, l'entraide, l'altruisme. Donc je pense que ça a peut-être fait son petit bonhomme de chemin. J’ai pris le temps d’expliquer ce qui s’était passé avec le séisme, l’ampleur des besoins sur place et la manière dont on pouvait, à notre échelle, apporter une aide concrète. Cela a permis aux élèves de mieux comprendre la situation et de se sentir impliqués dans cette démarche solidaire.
Quand une cause est juste et bien portée, elle suscite naturellement l'envie d'agir – et tu sembles y parvenir avec succès ! Depuis 2018, tu organises des ateliers solidaires tout au long de l’année et tu as collecté près de 10 000 € en 7 ans. Quel est ton secret ?
Paule : Les finances ont changé depuis que mon association de yoga a perdu des élèves, passant de 140 à 70. Il a donc fallu trouver de nouvelles sources de revenus. Mes élèves ont eu plusieurs idées : l'une a tricoté des éponges pour le corps et la vaisselle, une autre a fabriqué des boucles d'oreilles, et d'autres encore ont créé des signets. Pour ma part, j'ai fabriqué des Bee Wraps, des toiles de coton imbibées de cire d'abeille, qui se sont bien vendus. Nous avons aussi créé des sticks à lèvres, et j'ai fabriqué des chouchous. Ces petites ventes, ajoutées les unes aux autres, permettent de gonfler la cagnotte. Même si les objets sont peu chers, entre 5 et 8 €, les gens sont généreux et souvent ajoutent un supplément, ce qui fait augmenter rapidement la somme. Les élèves continuent d’avoir de nouvelles idées, ce qui permet de diversifier les créations et de maintenir cette dynamique.

Dans ces sept années de cours solidaires au bénéfice de Karuna, quel est ton meilleur souvenir ?
Paule : Alors certes, c'est très égoïste comme réponse, mais c’est quand j'ai reçu le livre de Matthieu dédicacé à mon nom. Ça m'a fait un plaisir immense, la cerise sur le gâteau ! Même si on ne fait pas ça pour avoir un retour quand il y en a un, ça fait chaud au cœur, surtout quand ça vient de Matthieu.
Cette année, nous espérons donner un nouveau souffle à Action for Karuna. Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui voudrait organiser une collecte au profit de Karuna-Shechen ?
Paule : Mon conseil, c’est d’oser se lancer ! Il faut faire, peu importe si on ramène peu d’argent. Parce que même si l’on ne réunit que quelques euros, chaque contribution compte. Si 100 personnes collectent un peu, au final, cela représente une belle somme. J’ai vu au Népal tout ce qu’on pouvait accomplir avec peu de moyens. On fait une bonne chose, même avec peu, donc chaque euro est bienvenu, indispensable. Les gens sont généreux, ils sont gentils et c'est naturel chez eux de participer. Il ne faut pas se décourager si tout le monde ne répond pas à l’appel. Ce n’est pas toujours possible pour tout le monde, et c’est normal.
En plus, l’équipe de Karuna-Shechen est toujours là pour vous seconder et pour aussi résoudre les problèmes techniques. Voilà, vous êtes tous adorables. Donc c'est que du bonheur.
À travers des initiatives comme celle de Paule, des dizaines de personnes s’engagent chaque année en organisant des collectes pour soutenir Karuna-Shechen. Que ce soit par le biais du yoga, d’une cagnotte d’anniversaire ou d’un événement solidaire, ces collectes permettent de faire une réelle différence dans la vie de celles et ceux que nous accompagnons.